Le besoin
Dès le démarrage des chantiers d’insertion Batterie de la Pointe en 2009, la question de la réfection du pont donnant accès aux plateformes et aux casernements se pose. Les structures métalliques du pont d’origine sont rongées par la rouille et il est devenu risqué de l’emprunter. Pour accéder à leur relais de communications, les pompiers ont fait mettre en place un un escalier permettant le passage par le fossé. Cela pouvait convenir lors des chantiers internationaux mais montre vite ses limites dès lors que l’on a des matériaux lourds à transporter et un grand volume de gravats à évacuer. Différentes solutions sont explorées mais n’aboutissent pas. Les gravats qu’on ne peut évacuer continuent de s’accumuler. ADPP décide en 2012 de conduire un projet aussi proche que possible de la réalisation d’origine pour conserver au site sa valeur patrimoniale et pouvoir prétendre au lancement d’une souscription sous l’égide de la Fondation du patrimoine.
Le projet initial
Le principe de base est de remplacer les structures métalliques d’origine qui étaient rivetées façon tour Eiffel par des profilés d’aujourd’hui, bien moins coûteux, en s’appuyant sur les culées maçonnées en meulière existantes et sur trois couples de piles métalliques intermédiaires. Les caractéristiques générales du pont réhabilité sont les suivantes :
- charge maximum admissible pour le pont réhabilité fixée à dix tonnes.
- longueur totale 17,7 m (trois travées de 4,3 m et une de 4,8 m), largeur 4 m, hauteur sous tablier de 4 m,
- tablier en chêne, comme à l’origine, ou plaques béton avec trottoirs de part et d’autre équipés des rambardes métalliques du pont d’origine adaptées aux normes de sécurité d’aujourd’hui.
Pour associer les chantiers d’insertion à la réalisation de cet ouvrage en évitant le travail en hauteur, il est prévu que les tronçons de pont soient fabriqués en usine puis assemblés et équipés au niveau du sol avec mise en place finale par camion grue. On compte de 18 à 24 mois pour études, réalisations en usines, montage et épreuves de test sous réserve d’obtention du flux de financements nécessaires.
Ce projet, avalisé par l’Architecte des Bâtiments de France, a été accepté par la Fondation du patrimoine qui a ouvert en septembre 2013 une souscription dans le cadre d’une convention signée avec la Ville de Palaiseau, propriétaire du site, et l’association ADPP, porteuse du projet. Les dons déposés bénéficient d’une réduction d’impôt : www.fondation-patrimoine.org/14657
La souscription a immédiatement connu un très grand succès et deux mois après son lancement, les fonds nécessaires pour engager la première phase des travaux prévue au titre de la convention tripartite étaient largement acquis. Il appartenait à la Ville en tant que propriétaire du site et donc maître d’ouvrage de notifier la commande correspondante. On pouvait ainsi espérer inaugurer le pont réhabilité pour les journées du patrimoine 2016. La Ville n’a pas su le faire avant les élections municipales de 2014. La nouvelle majorité a bien confirmé sa volonté de mener l’affaire à son terme mais en 2020 le pont n’existe toujours pas..
Six années d’itérations infructueuses
Dans la convention signée par la Ville, trois tranches de travaux étaient distinguées :
- La première tranche avait pour objet la validation de l’avant projet et l’établissement des spécifications pour réalisations. Son montant (21 000 €) était inférieur au seuil de procédure imposant appel d’offres. Elle devait être engagée de gré à gré fin 2013.
- Les deux tranches suivantes portant sur les réalisations (montant global de 119 407 €) devaient être engagées à partir de 2014 après appels d’offres.
En 2014, la Ville a décidé seule de procéder différemment et ce n’est qu’en octobre 2014 qu’elle a lancé un appel à concurrence sur l’ensemble du projet. Les procédures ont fait que ce n’est qu’en juillet 2015 qu’un marché de maîtrise d’œuvre a été notifié à une grande entreprise de travaux publics. Dès la réunion de lancement, celle-ci, habituée aux grands travaux, a montré qu’elle avait un tout autre objectif que celui très clairement défini dans le marché qu’elle venait de signer. Ses premières esquisses on été fermement rejetées par le représentant de la Fondation sous le qualificatif de « pont d’autoroute ». Il aura fallu attendre jusqu’à juillet 2016 pour qu’un compromis soit trouvé et mars 2017 pour qu’un avenant à la convention soit cosigné. Cet avenant entérinait une augmentation de coût de 215 % essentiellement dû à la réfection totale des maçonneries en béton alors que l’engagement contractuel était l’utilisation des maçonneries en meulière existante et à l’allongement du pont pour pouvoir masquer le béton. C’est pour « préserver l’avenir » que la Ville a pris cette décision. Elle en a assumé la conséquence en recherchant et obtenant les financements complémentaires nécessaires. Les procédures ont fait que ce n’est qu’en mai 2018 que le marché de réalisation a été notifié. Pendant une année, le démarrage des travaux a été annoncé comme imminent mais en fait, en dehors de travaux préparatoires par les chantiers d’insertion, il ne s’est rien passé sur le site. Le pot aux roses à enfin été découvert en mai 2019. Alors que le marché de réalisation était notifié, la Ville a soudain décidé qu’il serait bon de faire contrôler le projet établi par le maître d’œuvre par un organisme qualifié. Celui-ci, faute sans doute de directives précises a montré que le pont prévu ne répondait pas aux normes de la circulation routière, tous types de véhicules, et, sans qu’aucune information n’en soit donnée aux signataires de la convention, un nouveau projet a été établi engendrant un nouveau surcoût de 125 000 €. Ce n’est qu’en juillet 2019 qu’un plan de coupe du pont pour ce nouveau projet a été transmis à la Fondation et à ADPP et là stupeur ! On était revenu cinq ans en arrière avec cette fois un véritable pont d’autoroute, profil inadmissible et renforcement des structures métalliques et maçonnées pour pouvoir répondre, suivant les normes et si l’on a bien compris, à d’éventuels freinages brutaux de véhicules très lourds circulant à grande vitesse : proprement aberrant quand on connait les lieux.
Cette solution était inacceptable tant par la Fondation que par ADPP qui, outre son souci de préserver le caractère patrimonial du site, ne pouvait accepter de cautionner auprès des contribuables locaux une telle dépense. Les tentatives pour sortir de cette impasse avant les élections municipales de 2020 ont été infructueuses. On en est donc là où l’on en était six à sept ans plus tôt, à ceci près qu’une souscription conduite par la Fondation est normalement close au bout de cinq ans si les factures de travaux de réalisation n’ont pas été présentées. La Fondation avec laquelle ADPP a depuis le début de cette affaire eu d’excellentes relations de confiance n’est pas formellement passée aux actes mais on ne peut plus abuser de sa patience.
La planche ci-après portant sur le profil du pont, principal objet des désaccords résume ces itérations (cliquer sur l’image pour présentation pleine page).
Pour plus de détails, télécharger la note « Réfection du pont de la Batterie de la Pointe. Rappels et situation en mai 2020.